Lost Coast, California
Après trois jours, c’en est fini avec la Lost Coast. Ça n’a pas été facile, au contraire, mais ça en a valu la peine.
Dans son ensemble, il s’agit certainement de la route la plus difficile que j’ai parcourue à ce jour. Il s’agit aussi de celle où j’ai vu les paysages les plus magnifiques. Malgré sa longueur d’à peine 200 km, on s’y sent aussi isolé que sur une route comme la Translabradorienne.
La route débute à Ferndale, un charmant village de style victorien. Aucune indication ne pointe vers la Lost Coast, hormis un petit panneau brun sur lequel est inscrit « Petrolia ». À la sortie de la ville, un vieux portique d’acier marque le commencement de la route étroite et mal entretenue. À cet endroit, il faut grimper près de 700 mètres avant d’atteindre la crête. Le paysage y est spectaculaire, et on peut enfin apercevoir l’océan, à Capetown, où ne se trouvent que quelques maisons.
Après avoir franchi un autre col aux pentes extrêmes, on rejoint enfin le bord de l’eau où l’on peut profiter d’un instant de repos. À cet endroit, pas de chalets luxueux comme sur le reste de la côte californienne, seulement quelques animaux de ferme.
Une dizaine de kilomètres plus loin, la route bifurque à nouveau vers les montagnes et le village de Petrolia. La route suit alors la rivière Mattole, non sans éviter à nouveau quelques passages en altitude.
Une fois arrivé à Honeydew, l’unique option est de continuer. Dans chaque direction, on ne trouve que des montagnes, parcourues par quelques routes aussi pentues que dramatiques.
Une dizaine de kilomètres plus loin, la route vers Shelter Cove se divise. À gauche, une route pavée et, à droite, un sentier de terre et de gravier : la route Kings Peak. Cinquante mètres plus loin, celle-ci entreprend une descente sinueuse de plusieurs kilomètres, jusqu’au fond de la vallée. Plusieurs arrêts y sont nécessaires afin de ne pas surchauffer ses freins. En effet, la route est si mauvaise que, avec un vélo chargé, il ne serait pas sécuritaire d’y circuler à beaucoup plus que 10 km/h.
Ensuite, la route monte et descend pendant plusieurs dizaines de kilomètres. Le revêtement est généralement de bonne qualité, pour une route du genre. Plusieurs ruisseaux l’enjambent, mais ceux-ci sont peu profonds et peuvent être traversés à vélo.
À Four Corners, point de départ de la fameuse Usal Road, il ne reste que 40 km à parcourir avant de rejoindre la route 1. Pourtant, ce tronçon barré et uniquement parcouru par quelques VTT représente plusieurs heures d’efforts. Les pentes y sont généralement moins fortes que celles sur le reste du trajet, et le sentier est tout sauf adapté aux vélos de route, si robustes soient-ils.
À plusieurs endroits, il faut pousser sa bicyclette. Le drainage déficient a causé d’importants problèmes d’érosion et des branches d’arbres jonchent le sol. Parfois, le roc en surface cause des changements de pente abrupts, lesquels sont également impossibles à négocier en selle.
Après une longue descente, la route atteint la plage Usal, laquelle marque la fin de la section fermée de la route. La plage magnifique est difficilement accessible et aucun commerce ne s’y trouve. Elle est bordée par des falaises de chaque côté et par une dense forêt derrière. Un beau jour du mois de mai, une dizaine de personnes s’y trouvait; la renommée de la plage isolée jouant contre sa réputation.
Avant de retrouver le confortable pavage de la route 1, la Usal road remonte une nouvelle fois au sommet des montagnes de la côte. Cette ultime barrière s’étend sur plusieurs kilomètres et s’incline en pente d’environ 15 %. Alors que les marqueurs de distance bordant la route s’approchent de 0, on peut profiter d’une dernière descente.
Une fois sur la route 1, il faut continuer plusieurs dizaines de kilomètres pour retrouver la civilisation, à Fort Bragg. La ville délabrée marque un bien triste constat, la Lost Coast est bel et bien terminée.
Cet article a d’abord été publié en septembre 2017 dans L’Heuristique, soit le journal étudiant de l’ÉTS. Il est reproduit sur ce blogue sur autorisation de l’auteur, en conformité avec Creative Commons [CC BY NC ND 4.0].