J’aime le vélo.
J’aime le vélo.
Hier, je suis parti du chalet familial à Saint-Didace dans les petites montagnes de Lanaudière pour rouler jusqu’à une fête familiale, à Asbestos dans les petites montagnes des Cantons-de-l’est. Je suis parti à l’aurore alors que la température avoisinait le point de congélation, pour arriver de l’autre côté sous le soleil de midi. Entre les deux, j’ai pris le plaisant traversier de Saint-Ignace-de-Loyola vers Sorel-Tracy.
Ce faisant, j’ai traversé une partie de la vallée du Saint-Laurent dans l’axe Nord-Sud. Étrangement, c’était la première fois que je roulais une telle distance dans cette direction. Au Québec, tout est organisé Est-Ouest, le long du fleuve. Il y a eu le Chemin du roi, et maintenant la 40, la 138, la 132, la 20. Nos autoroutes nous permettent de circuler à l’extrémité des rangs, dans les vestiges du système seigneurial… Mais entre les deux, il y a plein de petits chemins de travers qui nous racontent des histoires. Il y a des forêts, des rivières et des fins fonds de rang dont on a oublié l’existence, et qui pourtant sont autant de points sur la carte qui nous relient au territoire.
J’aime le vélo, car on avance trop lentement pour prendre des raccourcis. Dans les sous-bois, il y a peut-être une route de gravier excitante à descendre, comme la Montée des Laurentides, à l’ombre de beaux érables, maudite et aimée au printemps quand elle se transforme en gadoue pour le temps des sucres. Dans les champs, il y a peut-être un cours d’eau oublié, comme la rivière Chicot, combien de fois inondée, transformée et désormais malade, mais qui rappelle qu’il y a mille ans les gens la naviguaient pour entrer dans les terres. Au bout du rang, il y a peut-être une église fièrement construite qui n’apparait même pas sur la carte, comme à Saint-Viateur, dans l’ombre de Saint-Cuthbert. Dans un virage, il y peut-être une croix de chemin entretenue par toute une communauté, comme à Saint-Gérard-Majella… Saint-Gérard, qu’as-tu à me raconter? Combien de générations d’agriculteurs t’ont baptisé à la sueur de leurs fronts dans les champs de blé. Et soudainement, il y a peut-être Saint-Pie-de-Guire, et ça c’est vraiment un drôle de nom!
J’aime le vélo, car je peux non seulement parcourir la géographie du monde, mais aussi la découvrir. Il me semble que quand je descends une montagne d’un bord, 100 kilomètres plus loin lorsque j’en remonte une autre, j’ai encore assez d’élan pour m’envoler dans les airs.
J’aime le vélo, car les roues qui révolutionnent me rappellent la grande circularité dans laquelle nous vivons. Il me rappelle que la terre tourne, que le soleil se lève le matin et se couche le soir, et que les rayons qui chauffent l’air ramènent à chaque année les mêmes saisons.
J’aime le vélo, car il me rappelle que nous sommes à la surface de la terre.